Article publié le 22/06/2022

Ce vendredi 17 juin 2022, le Ministre Frank Vandenbroucke a invité à son cabinet les représentants des syndicats médicaux, une représentante des jeunes de Domus medica, les experts Ann Van den Bruel et Jean-Luc Belche et plusieurs hauts cadres de l’INAMI.

Après avoir lancé sa réforme du secteur hospitalier, le Ministre semble donc avoir entendu les nombreuses revendications du terrain (pénurie de MG, surcharge administrative inutile et chronophage, soutien insuffisant à la pratique, etc.) et compte bien apporter des solutions. Pour preuve : une note de 13 pages, intitulée « Vers un New Deal pour le (cabinet de) médecin généralistes », présentée lors de cette réunion.

Le GBO/Cartel se félicite que le Ministre fédéral de la Santé ait ainsi pris à bras le corps des revendications exprimées par le GBO/Cartel depuis de nombreuses années !

Ce « New Deal » se veut soutenir les MG via 5 piliers :

1. Veiller à un nombre suffisant et à une bonne répartition des (cabinets de) médecins généralistes. Au niveau individuel, ceci implique qu’un certain nombre de MG devront être prêts à s’installer en dehors des grands centres urbains, dans des zones en pénurie (rurales ou certains quartiers des grandes villes).
2. Réduire les formalités administratives inutiles. Le GBO/Cartel dénonce cette charge administrative tout aussi croissante qu’inutile depuis de nombreuses années. Revendications portées aussi par les plus jeunes, comme en témoignent le projet Kafka, et la campagne “Crocodile bleu” / zinloosattest.be. La version francophone de cette campagne “attestations inutiles” sera d’ailleurs lancée dès septembre en Wallonie et à Bruxelles, portée par la SSM-J et certains bancs du CMG. Le GBO/Cartel en est bien entendu partie prenante !
3. Améliorer l’accessibilité pour les patients, condition sine qua non de soins de santé bien organisés. Des mesures envisagées pour augmenter le nombre de patients ayant un DMG et faciliter l’accessibilité aux jeunes de moins de 25 ans sont des pistes qui vont dans la bonne direction !
4. Mettre l’accent sur un bon modèle organisationnel qui permet au (cabinet de) médecin généraliste de prendre en charge davantage de personnes. Une organisation avec une délégation de tâches et un soutien, y compris pour les soins non planifiables en dehors des heures de travail classiques Repenser le modèle d’organisation de la médecine générale au sein des soins primaires avec des assistants de pratique, et les autres prestataires de soins de première ligne … implique une collaboration multidisciplinaire qui n’est pas encore unanimement partagée par l’ensemble des MG
5. Élaborer un modèle de financement équilibré permettant de mieux prendre en compte la disponibilité, la coopération intradisciplinaire et interdisciplinaire, la continuité des soins, la qualité, la prévention et l’autonomisation (ndlr : du patient).

Si une rémunération partielle au forfait vise à diminuer la pression qui pousse les MG à réaliser un certain volume d’actes, le GBO/Cartel veillera à un équilibre acceptable entre les deux modes de rémunération. L’attrait financier de la profession de MG doit être préservé en maintenant un équilibre entre acte, forfait et capitation. Une forfaitarisation complète n’est pas envisageable pour le GBO/Cartel, qui prône plutôt un système mixte pour revaloriser la 1re ligne. Ainsi, poursuivre un renforcement des montants pour la prime de pratique intégrée et pour le DMG, dont la création revient à l’initiative du GBO/Cartel, sont des pistes à défendre.

De plus, un rééquilibrage des revenus entre les différentes professions médicales est indispensable (rien ne justifie les disparités actuelles de revenus entre médecins généralistes et médecins spécialistes d’une part et entre différentes spécialités d’autre part) pour améliorer l’attractivité financière des fonctions médicales en pénurie.

Compte tenu des nombreux défis auxquels doit faire face la MG, le GBO/Cartel se réjouit de voir que le ministre ait entendu le terrain, qu’il ait pris l’initiative de cette concertation et, surtout, que les déclarations d’intention reprises dans ce « New Deal » aillent dans la bonne direction !

Ce New Deal contient en effet de nombreux points positifs en termes de contenu et sont les gages d’une réelle prise de conscience que la santé (publique) repose sur une MG au centre d’une première ligne forte, reconnue et multidisciplinaire.

Encore faut-il que ce plan soit suivi d’actions concrètes. Le GBO/Cartel est impatient de prendre une part active à cette indispensable réforme en profondeur de la MG et a signalé aux membres du Cabinet que certaines priorités qui ne figuraient pas dans la note :

• L’application du principe de subsidiarité et la mise en œuvre graduelle d’un échelonnement afin d’optimiser, dans un intérêt de santé publique, la répartition optimale des tâches (et de la charge de travail) entre les différents métiers de la 1re ligne.
• Le financement des syndicats médicaux, qu’il faut impérativement revaloriser à hauteur de leur mission pour qu’ils puissent jouer pleinement leur rôle dans la représentation et le défense de la MG.
• L’élaboration immédiate d’un plan fédéral intégré de riposte en cas d’épidémie et/ou de catastrophe sanitaire (instauration d’une taskforce interministérielle dédiée à l’élaboration de ce plan, Commissariat de crise activable immédiatement en cas de crise sanitaire).
• Un soutien scientifique spécifique aux soins primaires dont la MG : incitants à la recherche pluridisciplinaire en santé au sein des sociétés scientifiques existantes (KCE, SSMG, chaire BeHive, etc), soutien à l’implémentation de la qualité et l’évaluation des soins (PAQS ambulatoire), financement de séances de GLEM interdisciplinaires, financement d’un réseau de veille sanitaire et d’un véritable système d’information sanitaire intégré et informatisé plus développé que l’actuel réseau des médecins vigies et du baromètre Covid-19, etc.

Une réforme de la MG prévue pour 2023 ? On l’espère car nous avons souligné l’urgence face à la situation sur le terrain

Outre une concertation soutenue avec les syndicats médicaux et l’INAMI, le Ministre compte également confier aux Drs Ann Van den Bruel et Jean-Luc Belche (déjà en charge du groupe de travail sur les téléconsultations) la direction d’un Groupe de réflexion visant à élaborer un modèle d’organisation et de financement nouveau et durable pour le cabinet de MG d’aujourd’hui.

Le GBO/Cartel salue cette initiative et compte bien prendre une part active à ce Groupe de réflexion, tout comme c’était déjà le cas pour le Groupe de travail sur les téléconsultations, dont faisaient partie deux administrateurs du GBO/Cartel. Ce Groupe de réflexion devra présenter des rapports intermédiaires à la Commission nationale médico-mutualiste et fournir une proposition concrète pour avril 2023.

Maintenant, il faut des actes et un calendrier

Si le Ministre reconnaît lui-même qu’il lui est difficile d’agir sur certains aspects depuis la régionalisation des soins de santé, il ne s’en lave pas les mains et fait certaines propositions concrètes dans son « New Deal ». C’est une bonne chose car nous attendons de la cohérence au sein de notre système de santé morcelé. Force est de constater que les cinq piliers présentés dans ce « New Deal » nécessiteront un engagement de la part des différents gouvernements de ce pays (vive le Rubik’s cube institutionnel !) et le GBO/Cartel attend donc que le niveau fédéral, le niveau régional et le niveau communautaire s’accordent pour permettre une meilleure pratique de la MG, avec plus de moyens.

Reste à voir quelles seront les solutions concrètes et conclusions sur lesquelles débouchera le Groupe de réflexion, emmené par Ann Van den Bruel et Jean-Luc Belche, et quel sera le calendrier mis en place pour réformer en profondeur la médecine générale ! Le GBO/cartel sera très vigilant.

Parus dans la presse médicale (interviews réalisées juste avant la réunion de concertation, alors que le GBO/Cartel venait de prendre connaissance de ce New Deal) :
• Vandenbroucke propose un New Deal pour les généralistes (Vincent Liévin pour Medi-Sphère, 17/06/2022)
• Vandenbroucke veut transformer la médecine générale (Vincent Claes pour Le Journal du Médecin, 17/06/2022)