Position du GBO sur la suppression du certificat médical pour maladie de courte durée, publiée le 11/10/2021.

Suppression du certificat médical pour maladie de courte durée : et pour tout le reste ?

Cette proposition va dans le sens de ce qui a déjà été suggéré par un groupe de jeunes MG flamands, le bien nommé groupe Kafka, issus des trois syndicats médicaux présents au nord du pays, AADM ASGB/Cartel dont fait partie le GBO et le MoDeS, BVAS (aile flamande de l’Absym) et Domus Medica !

Mais cette proposition n’est, à nos yeux qu’un premier pas bien frileux par rapport à ce que la MG demande depuis bien longtemps, à savoir d’une part et une réflexion globale de fond sur la problématique des certificats médicaux en tous genres et d’autre part sur les mesures de simplification de leur délivrance en ce compris par voie informatisée d’autre part. (cf. en fin de document).

En 2013 déjà, la Fondation Roi Baudouin avait publié un rapport intitulé « Les certificats médicaux en médecine générale. Analyse de la problématique et pistes de solutions dans le cadre du Réseau d’écoute première ligne de soin ». Ce rapport résulte d’une enquête démarrée en 2012, et d’une étude qui a impliqué non seulement des médecins généralistes mais également différents stakeholders tels que les cabinets ministériels et des services publics fédéraux. Au terme d’une méthodologie longue de six étapes successives, impliquant un groupe de travail composé de médecins généralistes à la fois cliniciens et académiciens, quatre types de certificats médicaux prioritaires furent retenus afin de dégager des pistes de solutions. Il s’agit des certificats « parapluie », des certificats sociaux, des « demandes d’accord Chapitre IV » et enfin, des certificats scolaires. Il serait bien utile de relire les conclusions de ce rapport pour envisager d’autres mesures.

En ce qui concerne le certificat pour cause de maladie de courte durée, annoncé par voie de presse et en urgence dans le cadre des discussions du conclave budgétaire, il est regrettable (une fois de plus !) qu’aucune concertation avec les secteurs concernés n’ait été organisée. En effet les réflexions doivent tenir compte des enjeux et des intérêts des différentes parties concernées à savoir les représentants des salariés, des médecins et des employeurs. Pour qu’une telle mesure soit efficace, l’adhésion des parties prenantes est essentielle.

Selon une étude de Université de Hasselt les certificats de maladie de 1 à 3 jours sont au nombre de 3 à 3,6 millions/an soit un coût approximatif évalué de 60 à 70 millions d’euros/an pour l’INAMI.

Le GBO demande, si cette économie est réalisée par l’application de la mesure, que le montant épargné soit directement affecté ailleurs dans le budget de la MG pour d’autres besoins non ou insuffisamment couverts.

Le GBO estime par ailleurs que la mesure n’aura qu’un impact très limité sur l’allègement des charges administratives et sur la surcharge des consultations, même si celle-ci peut fortement varier selon les contextes (là où les conditions socioéconomiques sont plus faibles, la demande peut être plus importante).

Le GBO estime que la suppression de ces certificats ne comporte pas de risque majeur de report de soins ou d’automédications inappropriées. D’autant plus que les mesures en voie de finalisation en matière de phono-consultations et de vidéo-consultations permettront, si besoin, au patient et au médecin de décider ensemble si une consultation s’impose ou non.

Le GBO souligne l’importance de considérer ces absences de courte durée aussi comme un des symptômes des difficultés rencontrées dans le milieu du travail. Il est remarquable de constater que dans les pays où ce certificat n’est plus exigé, la fréquence des absences de courte durée à diminué. Aux Pays-Bas, 37% des absences de courte durée sont liés au stress au travail. Sans nier l’existence de demandes de certificats non fondées, il est temps aussi de quitter l’image archaïque du travailleur profiteur du 19e siècle et celle des médecins trop complaisants voire responsables de faux certificats. Ce sont les mêmes qui s’opposent à la suppression des certificats et qui fustigent les certificats dits du « lundi » ou du « vendredi ». Si on ne fait plus confiance aux médecins, pourquoi alors craindre la suppression des certificats ?

Il est grand temps de restaurer la confiance entre employeurs, employés et médecins et de changer de paradigme dans leurs relations. Il est connu que plus une entreprise investit dans le bien-être au travail (par exemple, une plus grande flexibilité et une lutte contre le harcèlement), moins il y a d’absentéisme lié au stress.

Il est grand temps de repenser ce qui doit absolument être médicalement certifié de ce qui ne le doit pas.


Le GBO estime que le médecin ne doit être ni le notaire, ni le gendarme en matière de sécurité sociale tout en assumant bien entendu sa responsabilité sociale et son rôle dans la certification d’incapacité de travail pour raison médicale ou d’invalidité. Mais tout ne doit pas absolument être certifié et des pistes existent pour responsabiliser travailleurs et employeurs et vérifier le bien-fondé si besoin des incapacités de plus longue durée. La médecine du travail, par exemple, mieux financée par un fonds global, pourrait jouer un rôle beaucoup plus important. Mais c’est un autre sujet.

Le GBO profite de l’occasion pour rappeler qu’en dehors de la suppression du certificat obligatoire de courte durée de 1 à 3 jours, il est urgent de prendre d’autres mesures en rapport avec les certificats d’incapacité et d’aptitude, en matière de standardisation des procédures et d’informatisation comme :

  • Mettre en œuvre le plus rapidement possible le projet Mult-eMediatt.
    Informatisation du certificat d’incapacité de travail standardisé et informatisé plutôt que des certificats spécifiques pour l’enseignement, la SNCB, l’armée, la police, MEDEX, les services médicaux gérant les incapacités de travail désignés par les employeurs, les mutualités, etc.
  • Supprimer (ou au moins en débattre avec les parties prenantes) les obligations imposées aux citoyens de demander aux MG des certificats de « bonne santé » (clubs sportifs, associations en tous genres). Ces derniers ne reposant sur aucune évidence scientifique, dénués de pertinence et servant le plus souvent de « parapluie ».
  • Débattre avec les responsables scolaires de la pertinence des certificats exigés actuellement.
  • Supprimer l’exigence de remplir des formulaires compliqués de renouvellements annuels de remboursement des médicaments du chapitre IV pour maladies chroniques et s’assurer que les procédures informatisées ou non mises en place soient efficaces.
  • De manière générale, pour toute nouvelle nécessité de formalités administratives en matière de certificats d’incapacité, d’aptitude, ou donnant droit à des avantages sociaux, il est demandé aux autorités de se concerter avec les prestataires

 

Dr Paul De Munck
Président du GBO