Prescription d’antibiotiques : les MG belges enregistrent une des plus belles décroissance d’Europe … mais l’effort doit être poursuivi !
Flash-info 64/24, publié le 13/09/24
Les médecins généralistes pourraient se féliciter de la décroissance belge de 40 % en dix ans (2013-2022) de la prescription d’antibiotiques. Cette décroissance remarquable est une des meilleures d’Europe. Mais les généralistes belges doivent résolument poursuivre l’effort de meilleure prescription vu la situation du pays par rapport à nos voisins, principalement ceux du Nord de l’Europe.
Le GBO/Cartel partage le souci de développer des soins efficients de qualité en harmonie avec des objectifs de santé publique. Il ne conteste pas les objectifs ni la conformité des mesures proposées par le Service d’Évaluation et de Contrôle Médicaux (SECM), mais veut alerter l’INAMI sur les effets psychologiques négatifs de son courrier qui pourraient impacter les résultats recherchés, par découragement de prestataires vertueux « flagués » par les indicateurs et risque d’une pratique de médecine défensive. D’autant plus que la couverture médiatique de la démarche du SECM vis-à-vis des prestataires provoque un discrédit inutile sur l’ensemble de la profession.
Le terrain demande en priorité une aide de la part de l’administration pour éviter la « malpractice ». Ce partenariat souhaité ne pourra être effectivement assuré que s’il y a séparation stricte entre l’ information/évaluation et le contrôle, par nature sanctionnant.
Le GBO/Cartel insiste donc pour que soit remis en cause l’utilisation de l’organe du SECM dans un but d’amélioration de la qualité alors que l’intervention de cet organe devrait être limitée aux médecins surprescripteurs (outliers). Il faudrait pour cela un changement complet de dispositif.
Le GBO/Cartel suggère aussi, puisque, comme le SECM l’a fait savoir, ce type de procédure est amené à se développer pour d’autres objectifs de santé, qu’une réflexion s’établisse pour traiter en toute sérénité la question de la prise en charge des cas individuels « flaggés » par les indicateurs. Ce qu’il a fait savoir aux Administrateurs général et adjoint de l’INAMI dans son courrier du 12/09/2024 : « À cet effet, nous nous référons à des procédures analogues à celles développées par les commissions de profil. Nous proposons donc que les cas déviants ne soient pas directement soumis au SECM mais passent par le filtre d’une commission ou d’un GT réunissant Administration et représentants de la profession. »
Indicateurs
Nous prenons acte qu’« Il s’agit bien d’indicateurs du CNPQ (ndlr : Commission Nationale de la Promotion de la Qualité, où siège un représentant du GBO/Cartel), dont s’est emparé le SECM. ».
Nous restons convaincus, par les témoignages du terrain, que ces indicateurs, basés sur des statistiques pour des patientèles moyennes dans des conditions standards, ne prennent pas en compte les diversités de pratiques individuelles (sexe, âge, niveau social, pathologie, travail en heures ouvrables ou plus tardives, urgences assumées par la médecine générale…). Et par ailleurs ils restent imparfaits qualitativement : par exemple, un mauvais prescripteur prescrivant beaucoup d’amoxicilline pour des pathologies bénignes pourrait avoir un bon ratio amoxi/amoxi+amoxiclav. C’est ce qui trouble les prestataires, en particuliers ceux qui suivent fidèlement les recommandations BAPCOC (Belgian Antibiotic Policy Coordination Commission, qui édite le Guide belge de traitement anti-infectieux en pratique ambulatoire) … et les déstabilise, malgré leurs efforts réels de « dé-prescription ». Nous soumettrons ces remarques au CNPQ.
Cet écueil, nous en sommes persuadés, peut être évité si le travail de sensibilisation est réalisé en dehors du SECM, relayé au sein des GLEM dans un peer review dont nous faisons encore et toujours notre gold-standard.
Peer review
Vous constatez que « Le peer-review uniquement ne suffit pas à la maîtrise de la surconsommation d’antibiotiques ».
Nous constatons pourtant des résultats non négligeables sur les courbes de consommation d’antibiotiques éditées dans « Vers une Belgique en bonne santé » et révélant une diminution de 4 %/an, 40 % sur 10 ans entre 2013 et 2022 (cf. courbes en annexe). Il y a eu un rebond, certes, après la pandémie au Covid-19. Cela pourrait-il s’expliquer par l’insécurité des patients et des médecins en période de post-pandémie et/ou par un taux plus important d’infections lors de la levée des masques et de la distanciation sociale? On peut penser que ce n’est qu’une remontée conjoncturelle et non structurelle, en tous cas généralisée sur toute l’Europe.
Nous pourrions donc nous féliciter de cette décroissance belge, remarquable, qui est une des meilleures d’Europe. Mais nous pensons aussi qu’il est nécessaire de poursuivre l’effort de meilleure prescription vu la situation de la Belgique par rapport à nos voisins principalement du Nord de l’Europe.
Nous sommes convaincus que le peer review est un bon moyen pour y parvenir mais qu’il faut donner aux pairs les moyens de le faire avec un financement dédié pour les coachs scientifiques intervenant dans les réflexions. Nous préconisons d’imposer ce sujet dans les GLEM, en définissant une certaine rythmicité annuelle ou bisannuelle. Nous réitérons notre attachement à la liberté de prescription assortie de ses deux corollaires, la responsabilité et la solidarité.
Par ailleurs, la plupart des antibiotiques prescrits sont des génériques ou des médicaments bon marché (81%). Cela signifie que le coût (coût = prix X quantité) diminue lui aussi (de 7 % par an). »
Le GBO/Cartel confirme son implication dans « le combat collectif contre l’usage abusif d’antibiotiques » et la prescription médicamenteuse excessive en général . Les concepts de « dé-prescription » et « réconciliation thérapeutique en post hospitalisation » sont enseignés en formation initiale et continue.
La profession demande aussi de réactiver les campagnes d’information de la population pour soutenir les conseils prodigués par les prestataires.