Flash-info 108/22, publié le 19/12/2022
Postes de garde en médecine générale : pertinents, indispensables et à financer correctement !
« Les meilleurs soins, au meilleur endroit, au meilleur moment par le prestataire le plus adéquat et au juste prix »
Les gardes populations : elles assurent l’indispensable permanence de soins qui doit relever essentiellement d’un service public, qu’il soit rentable ou non. Or, certains postes médicaux de garde sont au bord du gouffre financier.
Pour un grand nombre de postes de garde, la situation financière est difficile, très difficile.
Le GBO/Cartel a tiré la sonnette d’alarme auprès des autorités. Certes, le budget global vient d’être indexé, et même majoré d’un million d’euros (voir notre Flash-info du 15/12/2022), mais cela reste insuffisant pour couvrir le coût réel de l’inflation avec ses conséquences que sont les multiples indexations des salaires et la flambée du coût des matières premières et de l’énergie.
Le même constat peut être fait pour les honoraires de disponibilité.
Cela nous amène à une réflexion en profondeur sur les postes de garde, qui sont avant tout un service (à la population) de santé publique et que l’Etat doit financer complètement, que le poste de garde soit rentable ou pas.
Quel est le constat que le GBO pose ?
- La garde en médecine générale garde toute sa pertinence dans notre système de santé pour assurer la permanence des soins, et cela à un moindre coût pour les pathologies non planifiables qui relèvent essentiellement de la MG. Pour cela il faut absolument améliorer l’efficience du système afin d’éviter les appels non justifiés à la garde, qui sont aujourd’hui parfois bienvenus pour augmenter l’activité (et donc les ressources) de certains PMG ou des salles d’urgences mais qui risquent de démotiver les médecins généralistes et hospitaliers de garde.
- Le tri 1733 est indispensable pour la mise en route des futures coopérations fonctionnelles, pour toutes les périodes de garde, sur tout le territoire belge, tant pour l’accès à la médecine générale qu’aux services d’urgence des hôpitaux :
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- Pour éviter que les patients ne contournent la régulation en MG et aboutissent de façon non justifiée dans les services d’urgence,
- Pour diminuer le nombre de MG de garde et la récurrence pénible de la garde,
- Pour diminuer les déplacements injustifiés non strictement médicaux (seuls les patients grabataires, en MR/MRS, en soins palliatifs relèvent essentiellement de la garde MG à domicile). Si les patients ne peuvent se déplacer pour des raisons sociales, il faut réactiver le financement de leur déplacement (ex. des « taxi sociaux »).
Il est donc indispensable que les Ministres compétents (Santé et Intérieur) mettent rapidement tout en œuvre pour que le 1733 soit opérationnel partout en Belgique (ainsi Bruxelles et Charleroi, notamment, n’y ont toujours pas accès aujourd’hui).
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La collaboration étroite entre services de garde de MG (et donc futures coopérations fonctionnelles) et urgences hospitalières est nécessaire.Il est indispensable de conserver des PMG avancés dans les régions rurales, plus vastes, ne jouissant pas d’une implantation d’hôpital à proximité de toute la population.En milieu urbain ou semi-rural, une proximité entre PMG et hôpital se justifie. Il est alors important de ne pas intégrer les PMG au sein même des locaux hospitaliers :
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- Le message du premier recours à une première ligne de soins est brouillé par ce genre d’intégration,
- L’indépendance des MG face aux exigences des gestionnaires d’hôpitaux n’est pas garantie, le coût des soins risque d’en être augmenté.
Par contre nous savons le prix financier et humain exorbitant de l’ouverture en nuit noire d’un PMG (coûts salariaux du personnel de nuit, incidence sur le nombre de MG de garde) : une collaboration étroite avec les services d’urgences lors de la fermeture effective du PMG et une régulation efficace avec un déplacement des MG uniquement pour les cas indispensables (soins palliatifs, patients en MR/MRS…), permettraient de réduire le nombre de MG la nuit.
Nous pouvons même penser que le MG de garde pourrait rester chez lui pendant cette nuit profonde vu le nombre réduit d’appel.
- Le financement des médecins de garde à la hauteur de leurs responsabilités et de la pénibilité des heures prestées au-delà des heures ouvrables est essentiel à la pérennité de la garde de 1re ligne. Pour cela il est indispensable de tenir compte des spécificités régionales liées aux densités de populations, particulièrement dans les régions rurales moins peuplées du sud du pays. Actuellement ce sont les MG de ces régions « peu rentables » qui supportent les coûts financiers, logistiques et humains de l’organisation du service public. Certains médecins gagnent 40 euros/heure bruts en garde.
Deux propositions :
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- Les honoraires de garde ne doivent plus être liés uniquement au volume des prestations, devant tenir compte de l’indispensable garantie du maintien du service public dans tous les territoires du pays. Les honoraires sont alors identiques pour tous les MG de garde, comme pour les pompiers ou la protection civile.
- Si les honoraires restent liés au volume des prestations, l’Etat doit alors garantir un montant minimum d’honoraires avec un honoraire de disponibilité important basé sur les moments et lieux « non rentables ». Un honoraire de disponibilité important identique pour tous partout en Belgique, MG de ville ou de campagne, qu’il y ait « rentabilité » assurée par les contacts-patients ou pas, n’est pas une idée que nous retenons : les pouvoirs publics doivent investir en particulier dans les activités indispensables pour répondre aux besoins de la population même si elles ne sont pas « rentables ».
- La force de travail en médecine générale doit être suffisante pour absorber toutes les demandes non planifiables, urgentes ou semi-urgentes pour décharger les services d’urgences de soins ne relevant pas de son recours.
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- Diplômer plus de MG,
- Réfléchir à la délégation des certaines tâches à d’autres prestataires de la santé,
- Élargir les Impulseo pour l’engagement de personnel (administratif et infirmier),
- Aider au financement (achat, location ou prêt) de locaux adaptés,
- Faciliter le déplacement, le parking,
- Soutenir les autres professions de première ligne pour favoriser le partenariat avec les MG.
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Une politique d’installation doit être réfléchie avec les MG : comment répartir de façon équitable la force de travail sur tout le territoire belge :prime d’installation pour les MG et paramédicaux, quotas suffisants de MG, mise à disposition de logements et locaux professionnels plus particulièrement dans les communes et régions en pénurie.
Financer correctement les infrastructures et la coordination des Postes Médicaux de Garde, assurer la sécurité du médecin généraliste et sa rémunération à hauteur de l’effort fourni pour le service à la population, organiser la bonne articulation entre service de médecine générale et services hospitaliers, en journée, en début de nuit et nuit profonde pour éviter l’épuisement des prestataires, est le devoir de l’État.
Nous attendons un effort substantiel à ce sujet avant la désaffection de la profession qui menace à tout moment.