No show : qu’est-il possible de faire pour que les patients arrêtent de poser des lapins ?
Flash-info 42/24, publié le 13/06/24
No show, PVPP, … les appellations sont nombreuses pour qualifier les rendez-vous (para)médicaux non honorés (patients qui ne se présentent pas au rendez-vous et ne préviennent pas), un phénomène qui continue à croitre d’années en années.
Selon les dernières enquêtes menées par le SNI (syndicat neutre pour indépendant) en collaboration avec l’UNPLIB (Union Nationale des Professions Libérales et Intellectuelles de Belgique), auprès de leurs membres titulaires de professions libérales (para)médicales (médecins, kinésithérapeutes, psychologues, dentistes…), le taux de rendez-vous non honorés s’élevait à 5 % en 2017, 8 % en 2019 (il n’existe pas de chiffres plus récents, le COVID étant passé par là).
Il n’existe à ce jour pas de chiffres récents pour objectiver l’ampleur du phénomène en médecine générale mais, sachant que les chiffres évoqués ci-dessus incluent notamment les kinés et dentistes (professions où il est de notoriété publique que le taux de « no show » est particulièrement élevé), on peut raisonnablement en déduire que le pourcentage de rendez-vous non honorés en MG est sans doute inférieur et suit la même courbe de croissance.
Même si ce phénomène reste encore fort heureusement minoritaire, il témoigne d’un manque de respect de certains patients envers la profession médicale … mais également envers les autres patients qui auraient pu reprendre la place de ces « désistements » et être soignés plus rapidement. Alors que la pénurie de médecins généralistes est un triste réalité à laquelle nous devons tous (médecins et patients) faire face, il nous paraissait important de nous pencher sur la question en vous aidant à sensibiliser les patients et en vous informant du cadre législatif et déontologique en place actuellement.
Qu’est-il possible de faire actuellement en Belgique ?
Cadre déontologique :
Si l’article 33 du Chapitre 4 (Intégrité) du Code de déontologie médicale 2018 est peu explicite quant à la problématique du « No show »[i], le commentaire de l’Ordre des médecins apporte un éclairage bienvenu :
(…) « le médecin ne peut pas percevoir des honoraires pour un rendez-vous qu’un patient n’a pas respecté. Par contre, il peut réclamer à son patient un dédommagement raisonnable s’il démontre qu’il a subi un dommage à cause du non-respect de ce rendez-vous. Le patient doit avoir été préalablement correctement informé des conditions d’application d’un tel dédommagement en cas d’annulation tardive ou de non-présentation à un rendez-vous. Cette indemnisation doit rester raisonnable et ne peut en aucun cas atteindre le montant des honoraires prévus pour la prestation. Enfin, si le patient a été confronté à des circonstances particulières, il y a lieu de les prendre en considération. »
Cadre législatif :
Le chapitre 6 du Code de droit économique portant sur clauses abusives introduit en outre le principe de réciprocité (si vous mettez en place un système d’indemnités, un patient serait donc en droit de vous réclamer également un dédommagement en cas de rendez-vous non honoré par ex.) et limite le montant du dédommagement pouvant être réclamé (celui-ci ne peut pas dépasser le montant de l’honoraire prévu pour la prestation) :
« Art. VI.83. Dans les contrats conclus entre une entreprise et un consommateur, sont en tout cas abusives, les clauses et conditions ou les combinaisons de clauses et conditions qui ont pour objet de :
(…)
17° déterminer le montant de l’indemnité due par le consommateur qui n’exécute pas ses obligations, sans prévoir une indemnité du même ordre à charge de l’entreprise qui n’exécute pas les siennes;
(…)
24° fixer des montants de dommages et intérêts réclamés en cas d’inexécution ou de retard dans l’exécution des obligations du consommateur qui dépassent manifestement l’étendue du préjudice susceptible d’être subi par l’entreprise;
(…) »
En conclusion, en cas d’annulation tardive ou de non-présentation à un rendez-vous, vous ne pouvez pas facturer d’honoraires au patient concerné mais pouvez lui réclamer un dédommagement pour autant que :
- le patient ait été préalablement correctement informé des conditions d’application d’un tel dédommagement (délai minimum, montant du dédommagement, etc). Ces informations doivent donc être affichées dans les lieux pratiques (salle d’attente, etc) et via les canaux en ligne si vous en disposez (site web, agenda en ligne, etc).
- le montant de l’indemnisation demandée en compensation doit rester raisonnable et ne peut en aucun cas atteindre le montant des honoraires prévus pour la prestation.
- vous teniez compte des éventuelles circonstances particulière auxquelles le patient pourrait avoir été confronté et justifiant son absence ou l’annulation tardive d’un rendez-vous.
Campagne de sensibilisation : Ne pas poser de lapin à son médecin, c‘est …
Il nous parait très important de sensibiliser les patients quant à l’importance d’annuler à temps leur rendez-vous pour que celui-ci puisse être donné à des patients ayant besoin d’être vus rapidement.
Le GBO/Cartel a donc développé des supports de communication spécifiques pour vous aider dans cette démarche et, si vous souhaitez mettre en place un système de dédommagement, leur donner l’information préalable requise. Car, ne nous voilons pas la face, ces rendez-vous non honorés représentent également un manque à gagner d’autant plus difficile à accepter en raison de la pénurie de médecins généralistes.
Si vous avez recours à un agenda en ligne pour la prise de rendez-vous, vous devrez impérativement y ajouter ce texte pour répondre à l’obligation d’information préalable des conditions d’application d’un tel dédommagement.
[i] Code de déontologie médicale 2018, Chapitre 4 (Intégrité), Article 33 :
Le médecin détermine ses honoraires correctement et conformément aux prestations réellement fournies.
Le médecin informe au préalable et de manière claire le patient de la façon dont il détermine ses honoraires.