Article publié le 29/10/2021.
Les futures coopérations fonctionnelles : le Gouvernement imagine une permanence médicale sans y associer les médecins à la gouvernance …Inacceptable, écoutez les médecins svp !
Une loi…
La loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé a modifié sensiblement les modalités de l’organisation de la permanence médicale : à partir du 1er juillet 2022, date d’entrée en vigueur de cette loi, tout médecin généraliste aura l’obligation de participer à la permanence médicale dans la zone où il exerce sa profession et ce dans le cadre d’une ‘coopération fonctionnelle’ agréée. Des dispenses à cette obligation pourront être octroyées sur la base de l’état de santé, de l’âge, de la situation familiale ou encore de l’exercice effectif de sa profession des soins de santé.
Un arrêté d’agrément…
Il y a un an était publié l’arrêté royal relatif aux modalités d’agrément de ces futures coopérations fonctionnelles.
Cet arrêté précise notamment que la coopération fonctionnelle doit être organisée sous forme d’ASBL, qu’elle doit couvrir une zone géographique continue et comprendre minimum 3 PMG et 300.000 habitants. Pour ces deux dernières exigences des dérogations sont possibles : ainsi il sera permis à une coopération fonctionnelle de ne comprendre qu’un seul poste de garde, mais pour un délai unique de deux ans, et à condition bien entendu de respecter les autres exigences prévues par cet arrêté.
Cette réglementation reste évidemment inopérante aussi longtemps qu’un cadre financier n’est pas publié (et que la loi n’entre en vigueur, soit le 1er juillet 2022).
Un projet (imbuvable) de financement…
Le lundi 25 octobre dernier était présenté en médico-mut un projet de financement de ces futures coopérations fonctionnelles, financement qui viendrait en fait se substituer à celui qui est actuellement octroyé aux postes de garde.
La manœuvre du fédéral est claire : récupérer dans son giron l’organisation des gardes (par le biais des coopérations fonctionnelles), gérées aujourd’hui, à la satisfaction de tout le monde, par les cercles dont l’organisation échappe au fédéral depuis la dernière réforme de l’Etat.
En l’état, le projet de financement semble imbuvable aux yeux de la plupart des acteurs de terrain. Imbuvable sur les modalités de financement qui sont prévues, imbuvable surtout sur les principes que véhicule ce projet.
L’intervention du GBO-Cartel en médico-mut
Sur le plan budgétaire, les représentants du GBO-Cartel ont une nouvelle fois rappelé en médico-mut qu’il n’était pas sain que le financement de l’organisation administrative des postes de garde (personnel non médical, bâtiment, transport, matériel…) émarge dans le budget partiel « honoraires médicaux ».
En effet, dans le cadre budgétaire actuel, toute révision à la hausse du financement de l’organisation administrative des postes de garde ne peut être réalisée qu’en utilisant le budget réservé aux honoraires des médecins.
Le GBO-Cartel demande d’appliquer le même principe que celui qui est appliqué pour les hôpitaux : leur ‘budget des moyens financiers’ (BMF) est distinct de celui des honoraires médicaux.
Rappelons d’ailleurs que la garde est un service d’utilité publique : elle répond à un besoin de la population.
Cela a été tout le débat des gardes de semaine, que d’aucunes voulaient justifier sur base du seul critère ‘rentabilité’, alors que la création ou le maintien d’une garde de semaine doit s’apprécier d’abord au regard de la nécessité de répondre aux besoin de la population concernée. Justifie-t-on le maintien d’un service d’urgence hospitalier sous l’angle de sa seule rentabilité sur le plan financier ?
Il est donc normal que l’Etat investisse des moyens spécifiques pour organiser la permanence médicale, et donc la garde, et ce indépendamment du budget des honoraires médicaux. La garantie d’une permanence médicale de première ligne pour la population est une fonction régalienne que l’Etat doit assumer et donc financer. Pas au détriment des honoraires médicaux.
Par contre les honoraires de disponibilité ont bien leur place dans le budget partiel ‘honoraires médicaux’ et, quasi à chaque réunion de la médico-mut, les représentants du GBO rappellent que ces honoraires doivent être revalorisés.
Pour revenir à la réunion de la médico-mut qui s’est tenue le 25 octobre dernier, les 3 syndicats médicaux ont, à l’unisson, refusé d’examiner ce projet de financement des coopérations fonctionnelles en séance sans avoir le temps de l’analyser avec leur arrière-banc (et donc les cercles). Son examen est donc reporté à une prochaine médico-mut.
Deux grosses incertitudes budgétaires
Il y a aussi deux grosses incertitudes sur le plan budgétaire que les représentants du GBO n’ont pas manqué d’évoqué en médico-mut.
Premier gros problème : il n’y a pas un cent de prévu dans le budget soins de santé 2022 pour revaloriser les honoraires médicaux (hormis l’indexation), que ce soient les honoraires de disponibilité, les visites en maisons de repos, le développement des téléconsultations, etc. Dès la présentation de la proposition de budget élaboré par les mutuelles au Comité de l’assurance du 4 octobre dernier, le GBO-Cartel dénonçait cette absence de budget supplémentaire pour le service de garde de semaine des médecins généralistes, pour les coopérations fonctionnelles et pour la revalorisation indispensable des consultations.
Second problème sur le plan budgétaire : si on s’en tient au budget global attribué aujourd’hui au financement des PMG, en ce compris les 3 M€ pour la garde de semaine et les 750.000 € prévus pour le financement du démarrage des coopérations fonctionnelles, il est évidemment illusoire sur le plan budgétaire de vouloir financer correctement les futures coopérations fonctionnelles, et encore moins l’extension des projets ‘gardes de semaine’. Sans doute l’INAMI le sait depuis longtemps puisque depuis quelques semaines, ses représentants ont mis fin au groupe de travail ‘gardes de semaine’ en n’y participant plus. Les futures coopérations fonctionnelles comme l’extension des gardes de semaine ne sauraient voir le jour sans attribution par les autorités d’un budget exogène suffisant.
Quelle place pour le MG dans l’organisation future des coopérations fonctionnelles ?
Mais, au-delà des questions d’argent, le projet de financement met en exergue des questions bien plus fondamentales :
- Quid de la place des MG dans la future gestion des coopérations fonctionnelles ?
- Qu’en est-il de la coordination médicale ?
En fait, le Gouvernement prévoit un nouveau cadre légal pour la permanence médicale, mais dans les textes qu’il dépose, il n’évoque les médecins à aucun endroit : oubli ou volonté délibérée d’exclure les MG de l’organisation future des coopérations fonctionnelles ? Inacceptable en tout cas pour le GBO-Cartel.
Le GBO-Cartel va déposer des revendications fortes
A l’écoute des très nombreux messages reçus du terrain, le GBO-Cartel va déposer, si possible en front commun avec les autres syndicats, en tout cas francophones, des revendications fortes, autour des 4 axes suivants :
- Le GBO-Cartel demande avec force au Gouvernement de réactiver un groupe de travail où se retrouveront des représentants du terrain (les syndicats et les cercles), des représentants de l’INAMI et des représentants du SPF Santé publique.
- Le GBO-Cartel demande aussi de postposer la date d’entrée en vigueur de cette nouvelle réglementation : alors que les MG sont débordés par les conséquences de la pandémie Covidqui se sont ajoutées aux innombrables tâches administratives chronophages qui ne cessent d’augmenter, ce n’est vraiment pas le moment de demander aux MG de consacrer du temps à rédiger des statuts et créer des ASBL pour créer ces coopérations fonctionnelles.
- Le GBO-Cartel demande au Gouvernement d’ÉCOUTER les médecins, et de suspendre le temps qu’il faudra toute exigence administrative supplémentaire comme la création des coopérations fonctionnelles. Message au Gouvernement : moins d’exigences, plus de bon sens !
- Le GBO-Cartel estime que l’implémentation des coopérations fonctionnelles dans la précipitation représente une réelle menace pour les actuels PMG : c’est tout le système actuel de la garde qui risque d’être ébranlé, avec toutes les conséquences que cela pourrait provoquer pour la population qui demande juste à être bien prise en charge en cas d’urgence.
Le Bureau du GBO