E PLURIBUS UNUM

Dr Lawrence Cuvelier

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Un billet d’humeur du Dr Lawrence Cuvelier, Vice-Président du GBO/Cartel, publié le 09/06/2023.

En français, on dirait quelque chose comme « de la multiplicité, de la diversité naît la force » mais c’est long. Y a pas à dire, ces romains avaient le sens de la formule !

Je vous racontais il y a quelques mois l’histoire de cette anglaise arrivée chez moi vers midi trente avec un fracture de l’avant-bras, qui, en évitant les services d’urgence grâce aux contacts directs que j’ai pu établir, avait fait une radio, vu l’orthopédiste et été plâtrée à temps pour prendre son train de quinze heures. Elle était stupéfaite de l’efficacité des soins de santé belges.

Ailleurs, l’herbe est plus verte ?

Leçon de cette expérience, nos services de santé sont efficients et efficaces. Et ailleurs ? Si les services de santé du Royaume-Uni sont performants en termes de résultats globaux, ils sont souvent stigmatisés pour leur manque de bienveillance, comme me l’expliquait un autre patient anglais qui vantait l’humanité de nos services de soins. Chez nos voisins du nord, il existe une vision plus utilitariste qui consiste notamment à ne pas laisser accès à la dialyse après un certain âge, ou à arrêter des soins contre le cancer à visée palliative quand ceux-ci sont trop coûteux. En Espagne, les médecins madrilènes ont fait grève en ce début d’année car on leur imposait un temps de consultation de 6 minutes.

Non, au GBO/Cartel, nous n’envions pas ces systèmes de soins dit nationaux. L’intérêt de comparer les performances des autres systèmes de santé, ce n’est pas d’en faire des copier-coller, mais d’adopter un point de vue distancié pour analyser ce qui peut être amélioré dans le nôtre.

L’enseignement et les soins de santé font partie d’un long processus évolutif propre à l’histoire de chaque pays. En Belgique, des systèmes de solidarité ont existé dès le moyen-âge, à travers les corporations qui assuraient soins et rente à des veuves, et à travers les hospices de bienfaisances dont nos CPAS sont les héritiers. La Belgique est la terre des compromis, loin de la radicalité des Français, qui ne parviennent pas à trouver un terrain d’entente sur la façon de faire face à la hausse des coûts ou sur la gestion des problèmes de santé liés au vieillissement, chaque opinion fustigeant l’autre. Il est ridicule de juger un système par rapport à un autre, chacun à ses forces et ses faiblesses.

Au GBO/Cartel, notre but est d’améliorer notre métier, pas de le casser par immobilisme ou par des propositions radicales.

Le GBO/Cartel est soucieux de prodiguer les meilleurs soins, au meilleur endroit, avec la préoccupation de ne pas gaspiller nos énergies et nos ressources pour des questions de rentabilité de services ou d’hôpitaux. Notre système de santé est évidemment perfectible, mais il faut garder à l’esprit que la motivation des prestataires doit aller de pair avec un minimum de respect de la vie privée. Ceux qui proclament que rien ne doit changer ou s’opposent à toute réforme par crainte de perte de privilèges m’étonneront toujours. L’histoire de l’anglaise montre qu’il y a moyen de prodiguer des soins sans passer par le service des urgences, passage qui représente une perte de temps et d’énergie considérable. Encore faut-il que les spécialistes puissent répondre à l’attente des généralistes, et donc ne pas être submergés de consultations inutiles, redondantes et alimentaires. En cette période de restriction de l’offre, on ne peut pas se contenter d’un statu quo. Pour résoudre ces problèmes, il faut à la fois une analyse claire de la situation et une détermination suffisante.

Tous pour un, un pour tous

Les médecins cliniciens ont appris à se défier des apparences, à chercher l’étiologie d’un symptôme, à mener un travail d’enquêteur, à peser le pour et le contre dans des situations complexes. Pourtant, on a parfois l’impression que certains n’ont une vision des problèmes de santé qu’en noir et blanc, en bon et mauvais. Le GBO/Cartel présente en son sein des médecins conventionnés et des non-conventionnés, des médecins qui travaillent en solo, en groupe ou au sein de maisons médicales. Il existe des indépendants et une minorité de salariés. Nous travaillons au sein du Cartel, qui regroupe le MoDeS (Le Monde des Spécialistes – pour les spécialistes francophones) et l’ASGB (spécialistes et généralistes flamands). Nous travaillons dans le respect des différences et, loin de les ignorer, nous avons à cœur de les surmonter dans le respect de chacun. Le GBO/Cartel a obtenu de nombreux succès, seul contre tous ou avec ses alliés, qui permettent d’offrir au généraliste un revenu décent grâce aux primes, au DMG et à la revalorisation des actes. Nous avons élaboré un programme solide, l’un spécifique au GBO et l’autre, plus général, qui regroupe les points essentiels du Cartel. Notre but est d’améliorer notre métier, pas de le casser par immobilisme ou par des propositions radicales. C’est ensemble, grâce à vos remarques, fussent-elles négatives, et à votre soutien, que nous avancerons en ce sens.

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Dr Lawrence Cuvelier