Chasse ouverte au médecin fraudeur, pas si vite !

Date:
Lundi 12 Septembre 2016
Boite aux lettres de dénonciation au temps des Doges à Venise

Que ce soit clair : le GBO désapprouve avec fermeté la fraude sous toutes ses formes, qu’elle soit au détriment de la sécurité sociale, d’ordre fiscal ou de faux en écriture. Elle est inacceptable et, qui plus est, scandaleuse lorsque, par exemple, des sommes indues sont réclamées à des patients qui dans un souci bien légitime de pouvoir avoir « le meilleur soin » acceptent de les payer sans aucune transparence pour pouvoir l’obtenir. C’est encore plus grave lorsqu’elle s’adresse à des patients plus vulnérables, victimes dès lors d’abus de faiblesse.

Cela étant, les méthodes proposées par d’aucuns, mandataires politiques ou pouvoirs publics  sont scandaleuses et très probablement inefficaces.

Scandaleuse, car la dénonciation, ou mieux la délation, sont des procédés qui sont en eux-mêmes porteurs de beaucoup d’injustices et de création d’un climat mettant à mal le lien social et l’indispensable relation de confiance entre les citoyens et leurs médecins . Il est à craindre qu’avec de telles mesures,  le médecin  dénoncé ne sera pas celui qui travaille dans une clinique prestigieuse à la réputation extraordinaire dans des clubs huppés, mais celui qui aura déplu à un patient au désir de vengeance en lui refusant par exemple,  une prescription de tranquilisant ou un certificat d’incapacité de travail injustifié. Se trouver accusé avec bien souvent aucun moyen de preuve et avec les privilèges extraordinaires que l’administration fiscale s’est vu octroyés risque de devenir un cauchemar  pour bien de nos confrères soucieux d’exercer leur art dans le respect des règles d’éthique et de déontologie.

Baser la lutte contre les fraudeurs, médecins ou autres, par une campagne de délation au sein de la société relève en général de régimes très autoritaires ou dictatoriaux voire d’occupation !

Inefficace, car l’expérience des généralistes prouve que quand un abus leur est rapporté, il s’agit souvent de milliers d’euros, le patient renonçant à porter plainte par désir de respect du lien qui s’est établi entre lui et son médecin.

Aujourd’hui les pouvoirs publics ont à leur disposition un arsenal de dispositifs tant juridiques que déontologiques ou administratifs pour mettre en évidence les abus manifestes et les sanctionner. Des médecins contrevenants sont d’ailleurs régulièrement sanctionnés. Les patients ont aussi la possibilité de s’informer auprès de l’Inami et de leur organisme assureur lorsqu’ils s’estiment victimes d’abus.

Le GBO  souhaite replacer le débat des dépassements injustifiés d’honoraires et des faux certificats  dans une autre dimension que celle sordide et ostracisante de la délation. Il existe d’autres moyens pour éviter la majorité des fraudes. La plupart de nos citoyens dispose d’un compte en banque, et ceux qui n’en disposent pas font partie des plus défavorisés pour lesquels des dispositions existent déjà.  La suppression de toute transaction  par l’argent cash serait une solution pratique, qu’il s’agisse de médecin conventionné ou non. Cela n’enlève pas la nécessité de responsabilisation des patients mais cela doit se faire dans un cadre de meilleure rationalisation des soins de santé.

Le GBO ne peut qu’être affligé par la tendance de certains actuellement de vouloir créer un climat de chasse aux sorcières, en dénonçant, soi-disant pour de bonnes raisons,  les agissements de quelques-uns dans un climat qui à la longue décrédibilise un corps social tout entier.