Budget 2025 : un dépassement imprévu nécessitant des mesures de correction non souhaitées (ni souhaitables) mais inévitables
Flash-info 70/24, publié le 15/10/24
Les impératifs d’une situation budgétaire inquiétante
En juin 2024, les autorités nous avaient annoncé un dépassement modéré du budget des soins de santé, laissant espérer des marges de manœuvre pour améliorer nos conditions de travail. En réalité, le déficit est bien plus conséquent, atteignant plusieurs centaines de millions d’euros. Les révisions techniques de septembre, qui anticipent la trajectoire budgétaire de l’année suivante, révèlent une augmentation inattendue des dépenses. Après corrections, le déficit s’élève à 216 millions d’euros suite aux dépassements dans divers secteurs, dont celui des honoraires médicaux à hauteur de 75 millions.
Parmi ces dépassements, près de 70 millions sont attribuables à la hausse des consultations à distance, principalement des phono-consultations par les généralistes. Face à cette situation, la loi exige une correction immédiate, sous peine de voir la proposition budgétaire rejetée par le Conseil Général, où les médecins n’ont aucun droit de vote. Dans un contexte politique instable, où le gouvernement est en affaires courantes, aucune initiative majeure ne peut être prise, nous laissant face à un dilemme budgétaire crucial.
Il est impératif de trouver une solution crédible et équilibrée pour préserver nos prestations, notamment les consultations à distance, tout en respectant les impératifs financiers et sans perdre l’indexation des honoraires (3,3%) et l’application de la norme de croissance légale (2,5%)
Mesures proposées pour maintenir les consultations à distance
Le GBO/Cartel reste fermement attaché à la préservation des consultations à distance dans la nomenclature, avec une juste rémunération. Ces prestations sont unanimement reconnues pour leur valeur ajoutée, tant par les patients que par les prestataires, les organismes assureurs (OA), l’INAMI et les autorités. Toutefois, les dépenses ont été sous-estimées, car ces consultations, initialement jugées budgétairement neutres parce que conçues pour remplacer des consultations, ont vu leur demande croître de manière inattendue depuis la pandémie de Covid-19, rétribuant un travail effectué par les prestataires jusque-là à titre gracieux.
La hausse des phono-consultations, passées de 2 à 6 millions d’actes en un an, résulte d’une demande croissante des patients. Cependant, il faut penser qu’une consommation inappropriée ne soit le fait que d’une minorité de médecins (selon nos estimations, seulement 4% des généralistes utilisent un quart du budget en facturant plus de 2000 phono-consultations par an et 16% des généralistes en dépensent la moitié en en facturant de 1000 à 2000 par an). Il est donc inconcevable de pénaliser toute une profession, surtout dans un contexte de surcharge de travail et de pénurie de personnel.
Néanmoins, des ajustements s’imposent. Le cadre actuel des phono-consultations manque de clarté et de structuration, ouvrant la voie à des interprétations divergentes. Une réglementation définitive est prévue pour 2026, mais des mesures transitoires seront nécessaires dès 2025. Parmi celles-ci sont citées : la possible réduction des honoraires, la limitation du volume annuel (entre 1000 et 2000 phono-consultations/an/MG), la forfaitarisation partielle ou totale de ces prestations, ou encore un lien thérapeutique obligatoire concrétisé par le DMG. L’objectif est de garantir un usage adéquat de la phono-consultation.
Ces mesures devront toutefois être équilibrées par des économies sur d’autres postes en médecine générale.
Le GBO/Cartel appelle à une réforme globale du financement de la médecine générale
Dans ce contexte, le GBO/Cartel appelle à une réflexion plus large : est-il acceptable de restreindre le financement de la médecine générale alors que les besoins des patients ne sont pas pleinement rencontrés et que les médecins sont au bord de la rupture ? La médecine générale est un pilier du système de santé. Un échelonnement intelligent des soins permettrait non seulement une meilleure répartition des ressources, mais aussi des économies substantielles à long terme.
La politique actuelle, qui accepte des prix exorbitants pour les médicaments innovants, n’entrave-t-elle pas une rémunération juste des prestataires de soins primaires ? Il est crucial de soutenir la médecine générale à la hauteur de sa contribution essentielle au système de santé. Faute de quoi, les médecins continueront à quitter la profession, alimentant un climat de frustration et de colère.
Le défi est de taille, il est impératif de le relever pour garantir un avenir durable et équitable à notre système de soins.