Appropriate Care : késako ? Économie déguisée ? Soins efficaces ou économies efficaces ?

Flash-info 57/23, publié le 30/06/2023

De quoi s’agit-il ?

Dans la proposition de budget adoptée par le Comité de l‘assurance de l’INAMI (où se retrouvent les différents prestataires de soins et les mutuelles) le 3/10/22, il était question de l’imposition d’une nouvelle économie de 20 millions en 2023 (80 millions à partir de 2024), dont une très grande partie sera à charge des honoraires médicaux. Nous écrivions déjà (cf. Le GBO/Cartel s’est fermement opposé à la proposition de budget soins de santé 2023) qu’il apparaissait que « cette ‘réaffectation’ était en réalité une économie réelle, en totale contradiction donc avec le dernier accord médico-mut et alors que les besoins dans notre secteur restent également très importants. ». C’était une des deux raisons majeures pour lesquelles le GBO/Cartel s’était fermement opposé à cette proposition de budget.

Malheureusement, les médecins sont très minorisés au sein du Comité de l’assurance, et, lors du vote du budget définitif par le Conseil général du 17/10/22, ce passage de la proposition de budget du Comité de l’assurance (écrite par les mutuelles) a été reprise dans la proposition de budget du Gouvernement, dans les termes suivants (point 3.6. Appropriate Care) : « Cet effort sera renforcé à partir de 2023 par la fixation d’objectifs chiffrés concernant l’élimination des dépenses qui ne conduisent pas à des soins appropriés (‘appropriate care’), en faisant appel à tous les secteurs. L’objectif est de créer une marge pour répondre aux besoins non satisfaits dès 2023 (20 millions) et surtout en 2024 (80 millions). La moitié de ces moyens peut être utilisée dans le secteur concerné en 2024, et l’autre moitié (qui fera partie du montant non-financé) dans le cadre de l’objectif budgétaire global. ».

En clair, comme nous l’écrivions le 24/10/22 (cf. Budget soins de santé 2023 : état des lieux et décodage) : les économies que les médecins dégageront sur leurs propres honoraires seront perdues pour moitié (la moitié des moyens dégagée peut être utilisée dans le secteur concerné en 2024, et l’autre moitié dans le cadre de l’objectif budgétaire global). Cerise sur le gâteau : en l’absence d’une proposition d’économie « appropriée et budgétée » d’ici au 30/09/23, le montant sera déduit linéairement du budget du secteur concerné.

Suite à cette décision du Conseil général, il appartenait donc aux secteurs d’élaborer des propositions en fonction de l’effort demandé. Et, en l’absence d’une proposition appropriée d’ici le 30/09/23, le montant risquait d’être déduit de façon linéaire des secteurs pour leur part convenue des soins appropriés : le GBO/Cartel ne pouvait pas prendre ce risque vu qu’alors tous les honoraires de consultation, visites et avis auraient été impactés !

Travaux du GT ad hoc (Appropriate Care)

Le Comité de l’assurance a donc réactivé groupe de travail Appropriate Care et les diverses propositions ont été soumises aux différentes Commissions de conventions et donc, pour ce qui concerne les médecins, à la médico-mut.

Le GBO/Cartel n’avait donc pas d’autre choix que d’essayer de limiter la casse en médecine générale et, surtout, éviter que soient prises en octobre prochain, des économies linéaires sur les tarifs des consultations, visites et avis.

Très vite, une mesure est apparue pour la médecine générale : une diminution de la prestation 101113 (Supplément de permanence porté en compte pour les consultations effectuées entre 18 h et 21 h, réservé aux médecins inscrits auprès d’un service de garde organisé).

La première idée des mutuelles et d’AADM étaient de ramener le tarif de 4,66 € à 4 € (diminution donc de 0,66 €), ce qui était évidemment incohérent et contraire à la philosophie de l’appropriate care. Soit cette prestation est réellement inappropriée (quod non), mais alors il fallait la supprimer tout à fait. Soit elle n’est ‘inappropriée’ que parce qu’elle est attestée bien trop souvent et, de fait, il a été constaté que le nombre de ces prestations attesté en 2022 avait explosé par rapport à 2021. La raison en est que la facturation de ce supplément a été automatisé, surtout dans les logiciels utilisés en Flandre (comme CareConnect) et, dès lors, l’explosion a surtout touché la Flandre qui facture plus de 85% de ces suppléments (tant en montants qu’en nombre de cas), alors que les médecins bruxellois n’en facturent que 2% du total et les Wallons 12,5%…

L’idée était donc de limiter le nombre de ces suppléments par rapport au nombre total des consultations qu’atteste un généraliste, pour éviter l’effet d’aubaine en reculant l’heure des consultations pour pouvoir percevoir un maximum de ces suppléments.

Toutefois une telle mesure est très compliquée à mettre en œuvre sur le plan technique et il a dès lors été décidé de réduire le tarif de ce supplément 101113 de 0,66 € à titre temporaire à partir du 1/10/2023 jusqu’au 31/12/2023.

Ensuite, le tarif sera reporté de 0,33 € et il devrait alors être mis en place un système qui s’attaque à l’utilisation abusive de ce code, par exemple en fixant un pourcentage maximum pour l’utilisation du code 101113 sur le nombre total de consultations.

A noter que sur la table, il y avait d’autres idées saugrenues, comme celle de toucher à la prime de pratique : le GBO/Cartel s’y est évidemment fortement opposé et cette proposition n’a pas été retenue.

Conclusion

Sur le bien-fondé de réduire des dépenses inappropriées, le GBO/Cartel ne peut être que d’accord. Mais la manière de procéder est elle-même inappropriée.

Heureusement, grâce aux efforts du GBO/Cartel, la médecine générale s’en sort bien dans cet exercice périlleux puisqu’elle ne contribue qu’à raison de 9,14% de l’ensemble des mesures proposées par la médico-mut.

Tout cela sera approuvé définitivement par le Conseil général de ce lundi 3 juillet.