Alternative à l’hospitalisation – Virage ambulatoire
L’hôpital est et restera ce lieu d’excellence où des soins techniques performants sont délivrés aux patients qui en ont besoin. Pourtant, le recours à l’hospitalisation n’est parfois pas sans inconvénient. Que penser de l’allongement de certaines hospitalisations justifiées uniquement par des contraintes techniques, de l’augmentation des récurrences à cause d’une mauvaise collaboration avec le MG, d’actes prescrits par nécessité de productivité, de prépondérance accordée à la haute technologie pouvant menant au surinvestissement ou à la surconsommation ?
C’est dans ce contexte que se déploie le concept d’alternative à l’hospitalisation, c’est-à-dire d’un retour vers le milieu ambulatoire d’une série de situations qui peuvent se gérer hors de l’hôpital. L’alternative à l’hospitalisation doit être modelée dans la volonté de donner une place centrale au patient et un rôle central au MG, à la coordination des soins, à la multidisciplinarité, à la concertation entre les métiers. Le retour à domicile doit se faire selon un schéma généraliste, tenant compte de ses conditions de travail, et avec un financement à la hauteur de la tâche.
Il faut distinguer
- les maladies compliquées dont le diagnostic et le traitement demandent un haut degré de performance technique spécialisé et une implication du MG moins importante
- les maladies complexes qui impliquent plusieurs disciplines médicales et/ou plusieurs éléments de vie (demandant l’intervention pluridisciplinaire, sociale, psychologique…), domaine dans lequel le MG est le plus qualifié pour en gérer la complexité: insuffisance cardiaque, BPCO, dialyse à domicile, dépistage apnée du sommeil, patient gériatrique multi-déficitaire, santé mentale.
Conditions et moyens d’une alternative réussie
Elle doit recueillir l’acceptation de tous les partenaires (patient, famille, aidant proche et MG), se centrer sur le patient réel et ne pas se cantonner au cadre d’une pathologie particulière. Sur le plan matériel, il faut garantir l’accès à un équipement correct, à des services professionnels, à une reconnaissance financière pour le patient et le généraliste, à des conditions raisonnables pour le déplacement et le parking des professionnels. Il faut enfin, et c’est essentiel, une structuration de la coordination ( fiches, dossier électronique, personnes ressources).
L’alternative à l’hospitalisation pourra s’appuyer sur la volonté de dégager les moyens nécessaires via la réforme du financement des hôpitaux avec conversion quand c’est possible en hospitalisation de jour et soins de type hospitalier à domicile.
Le financement du généraliste prendra en compte les consultations/visites longues, un DMG modulé pour les maladies chroniques, l’attribution d’un forfait par alternative à l’hospitalisation en complément aux visites à domicile, la promotion du travail en réseau ou en équipe pour répondre à la gestion et aux « urgences » de l’alternative.
Quels sont les risques ?
L’estompement de la notion de ligne de soins
L’alternative à l’hospitalisation nous met devant le choix entre l’envoi par l’hôpital de son personnel vers l’ambulatoire (hospitalisation à domicile) ou la mise en place d’une procédure d’alternative à l’hospitalisation du type soins palliatif (modèle 1.5), concept privilégié par le GBO. Ce concept implique le respect des missions de chaque ligne de soins sur un modèle d’échelonnement. Sur ce point, le GBO ne pourra tolérer un estompement de la notion de ligne de soins : la confusion des lignes risque de conduire à une présence accrue du paradigme spécialisé en soins ambulatoires, ce qui n’est pas souhaitable.
La négation de la notion de prévention quaternaire
Un autre risque serait la négation du rôle du MG de filtre actif, celui que nous jouons quand nous orientons le patient après analyse et le protégeons de soins excessifs de deuxième ligne (prévention quaternaire). Il n’est évidemment pas question que la MG joue le rôle d’un filtre passif qui ne sert qu’à dissuader.
En route vers le futur
Il doit s’agir d’un contrat win-win, avec une seconde ligne en appui de la première, dans une relation de confiance. Sa réalisation pourra bénéficier de l’expérience de projets pilote ainsi que du soutien par les structures existantes (RML et SISD) ou futures selon la nouvelle structuration territoriale de santé en première ligne, aussi bien à Bruxelles qu’en Wallonie.
L’alternative à l’hospitalisation entraînera de nouvelles manières de faire : réinvestissement dans les soins à domicile et dans la continuité des soins, mise en question du paiement à l’acte car il est insuffisant dans les situations complexes, changement de mentalité du patient, du médecin et de l’hôpital. C’est un nouveau métier qui se profile et ça en vaut la peine.